Kochi, 16h15.
Réveillés tôt, nous avons joué dans la chambre avant d’aller manger, un peu plus loin chaque matin, dans un endroit abrité de bambou, adorable et agréable. Ensuite nous sommes rentrés, en passant par un nouveau magasin de livres et un autre ou on vendait « Barbie in India ». Nous nous sommes lavés et j’ai paqueté le sac pour la libération de la chambre. Il ne nous restait plus qu’à attendre dix-sept heures avant de prendre l’avion, quatorze avant le départ pour l’aéroport. Rien de prévu. Ah, oui, chercher un collier de perles de bois pour Hélène. J’espérais prendre le temps de comparer les échoppes et les étals près de la « plage ». Nous l’avons acheté dans le premier étal visité. Nous l’avons pris violet, comme ça elle pourra le porter en plus de l’utiliser. Il paraît que les perles sont en manguier. Nous avons continué le long du bras de mer séparant Ernakulam de Fort-Cochin et nous sommes arrêtés dans les arbres. Nous y sommes restés près de deux heures, assis sur une grosse branche. Couché, je contemplais Cerise qui dessinait. Puis je me suis mis à dessiner moi aussi sur l’écorce. Une forme de land’art en mosaïque. Mes aventures sur le sous-continent indien avaient débuté dans un arbre à Dhaka, avec Benoît. Il semble qu’elles se terminent de la même manière. J’avais prévu de dîner dans l’excellent restaurant que nous avions fréquenté lors de notre arrivée, encore une boucle à clore. Il était bondé et nous avons préféré nous rendre au même restaurant que pour le déjeuner, à travers des rues inconnues, paisibles et ombragées. Les touristes nombreux ont pour la plupart l’air en difficulté, en tout cas pour apprécier ce qu’ils vivent. Ils se rencontrent entre compatriotes dans les mêmes endroits recommandés par les mêmes guides édités pour qu’ils se retrouvent. Une autre chose qui me déstabilise ici, c’est la valeur de l’argent. Deux heures trente de bateau pour neuf centimes, moins d’un franc pour une bague, puis près de douze francs pour un mauvais cours de cuisine de deux heures, moins d’un centime pour le journal, et douze francs encore pour une robe d’enfant. Des contrastes que je ne comprends pas toujours. Un système de marchandage, dont certains profitent et que d’autres appliquent avec correction. Plus que onze heures avant de prendre l’avion.
Netumbassery, 23h37.
C’est la saint Patrick ! Nous sommes retournés dans l’arbre pour regarder le ciel s’obscurcir plus lentement que les feuilles entre lui et nous. Si ça ce n’est pas les vacances, n’avoir rien d’autre à faire que d’attendre la nuit et détailler les nuances des couleurs. J’ai écris « pour les handicapés » à plusieurs endroits sur l’arbre, à la demande de Cerise, pour qu’ils sachent que s’ils veulent venir, quelqu’un va les porter sur l’arbre et qu’ils peuvent venir. J’ai repensé à ma vision des touristes et ils m’apparaît que je les vois en quête d’un bonheur chimérique qu’ils ne savent pas ou rechercher. C’est une simple projection bien sûr et une généralisation. Aujourd’hui mon bonheur est chez moi, avec ma femme et mes enfants que j’aime. Il m’a peut-être fallu ce voyage pour me rendre compte à quel point ma vie me satisfaisait. En rentrant à l’hôtel, Cerise, sur mes épaules, me racontait qu’il y avait plein de bonnes choses en Inde, que quand elle sera grande, elle reviendra en Inde, il y a trop de bonnes choses qu’elle aime, comme les coquillages, les milk-shakes, les sauces, les fruits, juste le jus de noix de coco, elle aime pas. Il me manquait quelques centaines de roupies pour payer le taxi pour aller à l’aéroport cette nuit, puisqu’il n’y avait plus de bus. Le distributeur était en panne et le suivant n’accepte pas mes cartes. Je me suis donc enfoncé, Cerise sur les épaules dans de nouvelles rues inconnues, et ai découvert un quartier animé, sous touristes, à quelques minutes de marche. De même ensuite, dans le bus, nous avons traversé Ernakulam dans les premières heures de la nuit. J’y ai découvert encore une toute autre vie que je regrette n’avoir pas visitée. J’aurai beaucoup plus marché si j’avais été seul. Ce bus traversait la vraie vie de Kochi, d’Ernakulam. Le film conseillé était une catastrophe. Après la danse initiale, l’aimée reçoit par accident un coup de feu à la tête, prétexte pour les deux cents suivants avant qu’on quitte le cinéma en cours, sous le regard étonné des autres cinéphiles. La rue principale Mahatma Gandhi Road était glauque, toutes les échoppes fermées et nous étions à la recherche d’un taxi qui nous emmenerait trop tôt à l’aéroport et nous ne savions pas trop comment. Un gardien d’hôtel m’a simplement dit de nous asseoir dans le hall et qu’il allait en appeler un. Comme c’était bienvenu. De la réception de cet hôtel, nous avons observé des Indiens uniquement sortir pour la soirée. Puis le taxi est arrivé et nous voici à l’aéroport international de Kochi, plus que cinq heures avant notre vol. |
|